> GNCHR

Un café avec 3 conseillères techniques de l’ERHR Nord-Est

Entretien

Pour célébrer les 10 ans des ERHR, nous donnons la parole à celles et ceux qui le font vivre au quotidien. Aujourd’hui nous vous proposons de découvrir le métier de « conseiller technique » avec un entretien croisé réunissant Claire-Élise Martin, Nadine Marc-Federico et Magali Berthou, conseillères techniques de l’ERHR Nord-Est (Antenne Bourgogne Franche-Comté).

Elles sont trois, avec des parcours différents, mais un même moteur : accompagner les personnes en situation de handicap rare et leurs proches, en tissant des liens entre les familles, les établissements, et les professionnels. Rencontre avec Claire-Élise (ergothérapeute), Nadine (psychologue clinicienne) et Magali (éducatrice de jeunes enfants), conseillères techniques au sein de l’Équipe Relais Handicaps Rares (ERHR) Nord-Est.

Des parcours différents, un même objectif

Claire-Élise : « Je suis ergothérapeute de formation. J’ai d’abord travaillé dans un IEM- SESSAD pour enfants en situation de handicap moteur, et en parallèle, dans un centre de rééducation. Quand une opportunité à mi-temps s’est ouverte à l’ERHR, j’ai tenté l’aventure. Je voulais garder un pied sur le terrain tout en prenant ce recul que permet le rôle de conseillère technique. Deux ans plus tard, je suis passée à temps plein. »

Nadine : « Je suis arrivée à la création de l’équipe, il y a dix ans. Psychologue clinicienne de formation, j’ai exercé dans des foyers de vie auprès d’adultes présentant un plurihandicap ou des handicaps associés. J’étais déjà dans un rôle d’appui technique auprès des équipes, ce qui a été une transition naturelle vers le poste de conseillère technique. C’est aussi ce parcours dans l’accompagnement direct des résidents, qui m’a amenée à la Communication Alternative et Améliorée (CAA), un sujet que je porte encore aujourd’hui. Il y a une réelle nécessité de mettre en place de la CAA pour les personnes afin de leur donner la parole concernant leur accompagnement. »

Magali : « J’ai un parcours d’éducatrice de jeunes enfants avec une vingtaine d’années en SESSAD auprès d’enfants avec déficience intellectuelle et troubles associés. Je travaillais déjà avec des personnes en situation de handicap rare, mais sans savoir que c’en était à l’époque. Quand j’ai découvert ce poste, j’ai tout de suite été intéressée par la dimension transversale du rôle qui prolongeait mon travail partenarial de terrain. »

Les compétences clés : écoute, respect, complémentarité

« Ce métier demande d’abord de l’écoute, du respect, de la bienveillance et beaucoup d’humilité », explique Magali. « On doit comprendre la personne dans son histoire, son environnement, son rythme, et à un moment précis de sa vie. Nos formations différentes sont une vraie force : quand on va sur le terrain à deux, nos regards se complètent et permettent des hypothèses et des propositions plus riches. »

Pour la mobilisation d’un conseiller technique pour une situation, « nous décidons de manière collégiale », explique Claire-Élise. « Parfois, certaines situations nous “parlent” plus, selon nos appétences ou nos formations. Mais nous faisons attention à ne pas nous enfermer dans des spécialités. Les situations sont, de fait, toujours complexes et peuvent demander plusieurs regards. »

Un quotidien varié et sur mesure

Difficile de décrire une journée type. Nadine résume : « Chaque situation est unique. On peut passer une journée entière sur le terrain pour observer et évaluer les besoins d’une personne, ou simplement intervenir par téléphone quelques fois par an. L’essentiel est de s’adapter. »

L’évaluation est au cœur de leur mission. « Nos observations sur le lieu de vie permettent de mieux comprendre les besoins, mais aussi les compétences de la personne et ainsi proposer des préconisations sur mesure », détaillent Magali et Claire-Élise. « Ça peut aller de l’aménagement de l’espace de vie, à la création d’outils personnalisés comme des plans tactiles, des emplois du temps en relief, ou encore des grilles de communication qui viendront soutenir la parole de la personne accompagnée, qui aideront la compréhension de la communication, du développement de la personne, de manifestations de l’épilepsie, ou de comportements problèmes, etc. Pour mettre en place tout cela, on s’appuie sur les compétences de chacun, à commencer par celles de la personne elle-même. L’important, c’est de co-construire avec la personne, la famille et les équipes, pour que les solutions soient réellement adaptées. »

« On peut aussi faire appel à des partenaires sur le terrain » abonde Magali. « Il ne faut pas oublier qu’il y a « relais » dans notre nom. On n’a pas vocation à être là tous les jours et toute la vie mais de trouver les bons relais sur le territoire pour la personne ».

Un exemple concret illustre ce travail : L’accompagnement d’un enfant de 8 ans porteur d’un syndrome rare ayant de nombreuses répercussions : troubles intellectuels, retard moteur, troubles visuels, particularités sensorielles, difficultés de sommeil et d’alimentation, comportements défis. Sa maman, allophone et isolée, n’avait aucun relais, ce qui l’empêchait de travailler et accentuait son isolement. L’ERHR a évalué les compétences de l’enfant, préconisé des principes d’accompagnement, mis en place des aides techniques (transport, cadre sécurisant, outils de CAA), relancé de nouvelles évaluations médicales et soutenu la mise en place d’un accompagnement médico-social sur mesure. L’appui coordonné de tous les partenaires, grâce à des rencontres pluridisciplinaires et des visites à domicile, a permis d’étayer l’accompagnement de façon transversale. « Nous poursuivons cet accompagnement en fonction des besoins et de l’évolution de l’enfant », expliquent les conseillères techniques.

En parallèle, les conseillères interviennent aussi dans des actions collectives : sensibilisations auprès des équipes, interventions dans les centres de formation, développement de Communauté de Pratiques (Huntington, épilepsies et handicap, réseau CAA, etc.) ou développement d’outils comme le « passeport d’accompagnement » pour mieux coordonner les acteurs autour de la personne. Les sensibilisations peuvent être diverses : à la maladie de Huntington, à l’impact des troubles des fonctions exécutives, à l’épilepsie, à la déficience auditive, à la Communication Alternative et Améliorée (CAA), etc.  

Cependant, elles sont souvent en lien avec la situation individuelle : « dans ses cas-là, la sensibilisation n’est pas généraliste mais en lien étroit avec l’accompagnement de la personne et s’inscrit dans la montée en compétences de son environnement » explique Nadine. Cela permet aussi de participer à l’évolution de l’accompagnement sur le territoire et au maillage du réseau.

Accompagner la prise de relai

À travers tout cela, le rôle du conseiller technique se dessine plus clairement. Il développe un accompagnement de proximité, sur mesure pour chaque situation, en mobilisant des compétences complémentaires issues de formations spécialisées et de métiers d’origine variés. Face aux manques d’évaluation sur le territoire, il propose et approfondit l’évaluation des compétences et des besoins des personnes accompagnées. Sa capacité de réactivité permet une analyse affinée et un retour efficace des préconisations. Le conseiller technique travaille main dans la main avec les familles et les professionnels de terrain, propose des sensibilisations personnalisées, crée des outils adaptés et favorise la prise de relais progressive par les équipes pour assurer la pérennité de l’accompagnement. Ressource identifiée sur le territoire, il contribue activement au maillage du réseau et à l’élaboration collective sur les situations complexes, optimisant ainsi l’accompagnement des personnes et développant durablement les compétences locales.

Les défis du terrain

Les difficultés sont bien réelles. Nadine alerte : « Le manque de moyens, le turn-over dans les équipes, le déficit de formation compliquent l’accompagnement des situations complexes. Et parfois, il y a des résistances au changement. Sans confiance mutuelle entre les familles, les professionnels et nous, rien n’avance. »

Un métier tourné vers l’avenir

Claire-Elise et Magali soulignent un enjeu clé : « Trouver l’équilibre entre l’accompagnement individuel, qui est notre cœur de métier, et les sensibilisations, qui sont de plus en plus demandées. Tout a du sens. Tout dépend de l’évolution du terrain et des besoins aussi. Mais avant tout, on doit aussi garder cette capacité de faire du sur-mesure et de résister aux approches trop formatées. »

Retrouvez les Équipes Relais aux Journées Nationales Handicaps Rares les 5 & 6 novembre 2025 à Strasbourg !

Programme et Inscriptions

Publié le 29 septembre 2025
top
  • Newsletter

  • Aller au contenu principal